Royaume Uni : dans l’antre de Neal’s Yard Dairy

Jason Hinds, fromager, catégorie grand voyageur

C

e n’était, à l’époque, qu’une petite boutique : en 1992, à 25 ans, Jason Hinds faisait ses premières armes fromagères derrière le comptoir de Neal’s Yard Dairy. « J’ai passé mon enfance au lycée français du Caire, où la monnaie d’échange à la récréation était les figurines Astérix et Tintin qui venaient dans l’emballage de la Vache qui rit. C’était au début des années 1970, il n’y avait qu’un seul magasin où l’on pouvait acheter des produits européens. Nous nous sommes régalés de ces petites cartes françaises et des fromages qui les accompagnaient. »

J’ai découvert peu à peu que nous avions, ici aussi, de grands fromages

« Ce fut une révélation ! »

Sa famille rentre au Royaume-Uni quand il a 10 ans. « Mon frère et moi avons gardé ces cartes comme des trophées. J’insistais auprès de ma mère pour aller acheter du fromage au supermarché. Puis, en grandissant, j’ai voulu acheter du fromage à la charcuterie locale au lieu d’aller à l’épicerie. »

Devenu étudiant, il s’intéresse de plus en plus aux fromages de qualité. « C’est ainsi que j’ai découvert que nous avions de grands fromages en Grande-Bretagne. Jusque-là, j’achetais surtout des fromages français et italiens. Quand j’ai découvert le Keen’s Cheddar et le Colston Bassett Stilton, tous deux au lait cru, ce fut une révélation. Alléluia ! Quand j’ai fini l’université, j’ai voulu conjuguer les deux sujets qui me passionnaient le plus : les voyages et le fromage. L’idée d’exporter les fromages britanniques s’est imposée comme la solution. »

Il a alors commencé à mener des recherches sur les produits fabriqués dans les fermes britanniques. « J’avais l’habitude d’aller à Soho tous les samedis pour acheter des disques, mais j’ai vite réduit mon budget musique pour acheter plus de fromage. C’est alors que j’ai découvert Neal’s Yard Dairy, près de Covent Garden. Six mois après avoir pris un emploi derrière le comptoir, j’ai lancé l’activité export vers les États-Unis. Notre rôle de dernier maillon de la chaîne fromagère est d’être là pour rassurer les clients et s’assurer que les producteurs sont bien rémunérés, c’est-à-dire que l’argent revienne au début de la chaîne. »

Jason Hinds a quitté Neal’s Yard fin 2022 pour vivre sa retraite avec son épouse. « Nous allons voyager pendant dix ans, à raison de deux pays par an, en commençant par l’Argentine et Naples », annonce-t-il. Il reste associé et administrateur de l’entreprise, « je conserverai donc un vif intérêt pour notre activité à distance », confie-t-il. ◼

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