Joëlle Birckner
Carte de contrôle, mode d’emploi
Enseignante à l’Enilbio de Poligny, Joëlle Birckner expliquera, le 11 avril, « comment mettre en place une carte de contrôle pour le suivi des rendements ».
A quoi sert une carte de contrôle ?
Elle permet d’identifier et de visualiser facilement sur un graphique des dérives anormales dans le process de fabrication, et d’indiquer quand il est pertinent d’intervenir. Elle permet de mieux suivre non seulement les rendements mais aussi, plus globalement, la qualité et la régularité des produits. C’est un outil très facile à mettre en œuvre. Nous présenterons, lors de la conférence, un cas concret, celui de la carte de contrôle que nous avons mis en place pour suivre les fabrications dans l’atelier de l’Enilbio.
Par quoi commencer ?
Le plus difficile est de récupérer les données. Au strict minimum, il faut le litrage transformé et la quantité de fromage au démoulage juste avant le salage. C’est suffisant pour calculer le rendement le plus basique, le « rendement brut ».
Pour aller plus loin, il faut utiliser les rendements dit « corrigés ». Ils prennent en compte les fluctuations de composition du lait et de l’extrait sec du fromage transformé. Ils permettent ainsi de bien isoler ce qui relève du process et de détecter d’éventuelles anomalies. Car il peut arriver que le fromager perde la « maîtrise du procédé ». Parce qu’un thermomètre ou un pH-mètre sont mal réglés, qu’un brassage est trop important, qu’un décaillage est trop fin, qu’une température d’égouttage est inappropriée... Tout cela, la carte de contrôle va le révéler.
Pour déterminer ce « rendement corrigé », il faut mesurer l’extrait sec du sérum (une méthode traditionnelle et peu coûteuse consiste à étuver le sérum et à laisser s’évaporer l’eau). Nous présenterons l’équation qui permet ensuite d’établir le calcul de rendement.
Et si l’on veut avoir une approche encore plus fine ?
Il faut alors calculer le « rendement MSU ». La MSU (Matière Sèche Utile), c’est l’addition de la matière grasse et de la matière protéique. Il faut donc analyser la composition du lait. Pour la MG, on peut le faire avec un butyromètre classique et une centrifugeuse. Pour les protéines, on utilise souvent la méthode du colorant « noir amido », qui permet de visualiser la concentration en matière protéique dans le fromage. On peut donc faire soi-même ces analyses, ou bien les sous-traiter. Une structure modeste peut procéder, de temps en temps, à des tests sur plusieurs jours.
On peut également raisonner en calculant les coefficients de récupération de la matière (sèche, MG, MP). Mais cela implique des analyses supplémentaires.
L’objectif final est d’identifier les anomalies et les écarts anormaux relevant du process, indépendamment de la composition du lait. La carte de contrôle permet de vérifier si le process est sous contrôle, s’il faut le rectifier ou non. Elle permet d’éviter les fausses pistes et de réagir vite quand c’est nécessaire. Les ateliers qui la mettent en place y ajoutent généralement de plus en plus de données. A Poligny, nous suivons ainsi le pH au démoulage, l’HFD (humidité dans le fromage dégraissé) et le gras sur sec.
Il faut donc disposer au départ d’un historique. De quelle durée ?
Idéalement, il faut une année de données. Plus on en aura, plus tôt on va déterminer des limites précises : une cible, des « limites de surveillance » (à partir desquelles on se met en alerte) et des « limites de contrôle » (à partir desquelles il faut intervenir). Une fois que ces limites sont bien déterminées, nous conseillons d’imprimer le document, de le plastifier et de noter les valeurs au fur et à mesure chaque jour. Il faut raisonner sur un mois d’enregistrement.